Gilles Poissonnet, Karen Benezery, Frédéric Peyrade, Alexandre Bozec, René-Jean Bensadoun, Pierre Yves Marcy, José Santini, Olivier Dassonville
Disponible sur internet : le 23 avril 2007
Institut universitaire de la face et du cou de Nice et Centre Antoine-Lacassagne, Nice (06)
Correspondance : Gilles Poissonnet, Centre Antoine-lacassagne, 33 avenue de Valombrose, 06189 Nice Cedex. Tél. : 04 92 03 14 38 Fax : 04 92 03 15 68 gilles.poissonnet@cal.nice.fnclcc.fr
■Key points
Upper aerodigestive tract carcinoma: therapeutic management
Cancers of the upper aerodigestive tract cover the solid tumors of the oral cavity, pharynx and larynx. The principal risk factors identified are smoking and alcohol. Moreover, the combination of alcohol and smoking increases the relative risk by more than simple multiplication. The pretreatment work-up represents the starting point in the natural history of the patient’s disease and conditions recovery and time course; it must be both specific and exhaustive. It leads to a TNM classification or staging that is a major prognostic factor and essential to determination of the appropriate therapy. Patients with cancer of the upper aerodigestive tract must receive cooperative multidisciplinary treatment. Conservative treatment strategies must be favored. Treatment is essentially surgical and radiological. Prognosis for survival is poor. For all stages and sites together, 5-year survival remains between 30 and 40%.
Disponible sur internet : le 23 avril 2007
Institut universitaire de la face et du cou de Nice et Centre Antoine-Lacassagne, Nice (06)
Correspondance : Gilles Poissonnet, Centre Antoine-lacassagne, 33 avenue de Valombrose, 06189 Nice Cedex. Tél. : 04 92 03 14 38 Fax : 04 92 03 15 68 gilles.poissonnet@cal.nice.fnclcc.fr
■Key points
Upper aerodigestive tract carcinoma: therapeutic management
Cancers of the upper aerodigestive tract cover the solid tumors of the oral cavity, pharynx and larynx. The principal risk factors identified are smoking and alcohol. Moreover, the combination of alcohol and smoking increases the relative risk by more than simple multiplication. The pretreatment work-up represents the starting point in the natural history of the patient’s disease and conditions recovery and time course; it must be both specific and exhaustive. It leads to a TNM classification or staging that is a major prognostic factor and essential to determination of the appropriate therapy. Patients with cancer of the upper aerodigestive tract must receive cooperative multidisciplinary treatment. Conservative treatment strategies must be favored. Treatment is essentially surgical and radiological. Prognosis for survival is poor. For all stages and sites together, 5-year survival remains between 30 and 40%.
■Points essentiels
Les cancers ORL ou des voies aérodigestives supérieures regrou- pent les tumeurs solides de la cavité buccale, du pharynx et du larynx. Les principaux facteurs de risques identifiés sont le tabac et l’alcool. De plus, l’association alcool-tabac “surmultiplie” le risque relatif. Le bilan préthérapeutique représente le point de départ dans l’histoire de la maladie d’un patient, il va conditionner sa guérison ou son évolution, il se doit d’être précis et exhaustif. Il aboutit à une classification TNM qui est un facteur pronostique majeur et la clef de voûte des indications thérapeutiques. La prise en charge des patients atteints de cancers ORL doit faire l’objet d’une concertation thérapeutique pluridisciplinaire. Les stratégies thérapeutiques conservatrices doivent être privilé- giées. Le traitement est essentiellement radiochirurgical. Le pronostic de survie est mauvais. Pour tous stades et localisa- tions confondus, la survie reste en moyenne entre 30 et 40 % à 5 ans.
Situation actuelle et objectifs
Les cancers ORL ou des voies aérodigestives supérieures (VADS) regroupent les tumeurs solides de la cavité buccale, du pharynx et du larynx. Ils sont fréquents en Europe et particulièrement en France où leur incidence annuelle, la plus élevée après la Hongrie, constitue le cinquième cancer le plus fréquent, après les cancers du sein, du côlon et du rectum, de la prostate et du poumon. En France, cette incidence a été estimée en 2000 aux alentours de 20 000 nou- veaux cas chez l’homme (4e rang par ordre de fréquence) et 3 000 nouveaux cas chez la femme (14e rang par ordre de fré- quence). La mortalité chez l’homme, après un pic de fréquence à 39 pour 100 000 en 1976, a été divisée par 2 à ce jour, soit un retour au taux de 1950. Chez la femme si la mortalité est bien moindre, en revanche, elle a doublé depuis 1950, pour être à ce jour aux alentours de 8 pour 100 000. La mortalité des carcino- mes des VADS est très inégale selon les régions françaises, dans les départements du Nord Pas-de-Calais, elle approche du double de celle des départements du Sud-Ouest [1]. En France, 90 % des décès par cancer des VADS chez l’homme sont attribuables au tabac et/ou à l’alcool [1].Ilexisteune corrélation entre l’âge du début de l’exposition, la dose jour- nalière, la durée de l’exposition et le risque carcinologique. La mortalité par cancers des VADS est 7 fois plus élevée chez les fumeurs de cigarettes que chez les non-fumeurs et reste 3 fois plus élevée chez les ex-fumeurs que chez les non-fumeurs. Le rôle du cannabis comme carcinogène est établi [2],enparticu- lier dans l’incidence des cancers de la langue chez des sujets de moins de 40 ans. En ce qui concerne l’alcool, le risque est proportionnel à la dose d’alcool pur consommé, sans effet de seuil. L’association alcool-tabac “surmultiplie” le risque relatif de cancer des VADS : un sujet qui fume 25 cigarettes et boit 10 verres de vin (environ 100 g d’alcool pur) par jour voit son risque relatif multiplié par 100.
Glossaire CHEP cricohyoïdoépiglottopexie CHP cricohyoïdopexie EBV Epstein-Barr Virus EFR épreuves fonctionnelles respiratoires EGF Epidermal Growth Factor IMRT radiothérapie par modulation d’intensité IRM imagerie par résonance magnétique RC3D radiothérapie conformationnelle en 3 dimensions RCMI radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité REGF récepteur de l’EGF TDM tomodensitométrie TEP tomographie par émission de positons UCNT carcinomes indifférenciés du nasopharynx VADS voies aérodigestives supérieures
D’autres facteurs de risque comme le bétel et les nitrosamines carcinogènes pour le cancer de la cavité buccale, le virus EBV (Epstein-Barr Virus) pour les carcinomes indifférenciés du naso- pharynx (UCNT), certains papillomavirus pour l’oropharynx ou le larynx (HPV 16 et 18), l’exposition aux hydrocarbures polycycli- ques pour la cavité buccale et le larynx, l’amiante pour le carci- nome du larynx, les poussières de bois pour l’adénocarcinome de l’ethmoïde sont connus. L’immunodépression induite par certains traitements post-greffes ou acquise comme pour le sida prédis- pose à la survenue d’un cancer des VADS. La meilleure prévention des cancers ORL passe par une réduc- tion effective et durable de la polyconsommation régulière du tabac et de l’alcool. Des actions éducatives régionales précoces sont à la base de toute politique de prévention. Le particularisme de ces tumeurs rend compte de l’histoire naturelle de ces cancers qui touchent le plus souvent l’homme de 50 à 70 ans. En effet, dans leur grande majorité ce sont des carcinomes épidermoïdes plus ou moins différenciés (90 % des cas). Ces tumeurs siègent dans une région anatomique complexe, aux nombreuses localisations et sous-localisations, dont la lymphophilie est importante (15 à 50 % d’atteinte ganglion- naire selon le site tumoral pour les cous “N0”) [3].Cesparti- cularités compliquent à la fois le bilan préthérapeutique et le traitement (abord chirurgical, procédé de réparation, balistique des radiations ionisantes à hautes doses, etc.). En France, la distribution de ces tumeurs selon la localisation est approximativement la suivante : cavités nasosinusiennes et nasopharynx 5 %, lèvres 10 %, cavité buccale 20 %, oropha- rynx 25 %, larynx 25 %, hypopharynx 15 %. Le diagnostic est fait le plus souvent à un stade tardif chez des patients souvent négligents car l’évolution est essentiellement locorégionale cervicofaciale, et c’est à un stade déjà avancé que le syndrome de masse endocavitaire et/ou cervical va entraîner un retentissement fonctionnel sur les fonctions de déglutition et de respiration. Une adénopathie cervicale indo- lore d’apparence isolée est souvent longtemps négligée par le patient. Le larynx constitue une exception par la dysphonie présente dès le début de la maladie pour les tumeurs de la corde vocale. Par ailleurs, on note la grande fréquence des localisations mul- tiples synchrones ou métachrones (10 à 20 %), le risque évo- lutif important de récidive locorégionale et un taux de métas- tases à distance (poumons, foie, os, système nerveux central) de 5 à 15 %. Les comorbidités associées sont fréquentes (plus de 50 % des cas lors de la première consultation), notamment cardiorespiratoires, hépatiques, vasculaires et les carences nutritionnelles multiples. Enfin le caractère algique et mutilant de ces tumeurs malignes qui vont devenir “visibles” aggrave le handicap et augmente encore les difficultés thérapeutiques, compliquées de plus par un contexte socioprofessionnel souvent difficile.
Les objectifs thérapeutiques reposent d’une part sur la préven- tion primaire avec la diminution des facteurs de risque princi- paux que sont le tabac et l’alcool, la prévention secondaire par le dépistage théorique des sujets les plus à risque (tabac alcool, lésions précancéreuses, etc.) et d’autre part sur la stra- tégie thérapeutique adaptée de la maladie avérée (cas le plus fréquent). Le bilan préthérapeutique représente le point de départ dans l’histoire de la maladie d’un patient, il va conditionner sa guérison ou son évolution, il se doit d’être précis et exhaustif. Le bilan loco- régional nécessite une pan-endoscopie ORL sous anesthésie géné- rale, associée si possible à une fibroscopie bronchique et œsogas- trique, à la recherche d’une seconde localisation (10 à 20 % des cas) ou d’une fréquente maladie associée (infection bronchique, œsophagite, ulcère gastroduodénal, etc.). Des biopsies sont effec- tuées à visée histodiagnostique et un schéma résume l’examen endoscopique. Le bilan est complété par une imagerie médicale orientée, tête et cou (TDM : tomodensitométrie, IRM : imagerie par résonance magnétique, échographie) et à distance (TDM tho- racomédiastinale, TEP : tomographie par émission de positons). L’état dentaire est apprécié (panorex, consultation spécialisée). Le bilan préthérapeutique aboutit à une classification TNM qui est un facteur pronostique majeur et la clef de voûte des indi- cations thérapeutiques. Par ailleurs, un bilan général clinique et biologique selon le terrain évalue non seulement l’opérabilité mais aussi les suites fonctionnelles prévisibles (EFR : épreuves fonctionnelles respi- ratoires, bilan cardiologique, vasculaire, etc.). On précise ainsi l’état général et nutritionnel du malade, l’impact des comorbi- dités associées en utilisant des scores pour aboutir à des échel- les de classification pertinentes comme l’index de Karnovski, le Performans Status de l’OMS ou le score ASA. L’âge chronolo- gique du malade n’est pas un facteur limitant, c’est plutôt l’âge physiologique qui sera apprécié.
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